Une Tesla Model S émet-elle plus de CO2 qu’un véhicule thermique? Le Financial Times avait cru comprendre que oui… avant d’être rappelé à l’ordre par des chercheurs de l’université américaine du MIT. L’occasion de revenir sur les enjeux environnementaux liés à la voiture électrique.
Si de nombreux Etats dans le monde font confiance aux véhicules électriques pour diminuer la pollution dans un avenir plus ou moins proche, certains doutent de cette stratégie. En France par exemple, l’annonce de la fin des ventes de véhicules essence et diesel programmée pour 2040 a fait émerger des questions légitimes, quant à la capacité des constructeurs automobiles et des fournisseurs d’énergie à répondre à la demande.
S’il est clair qu’un moteur électrique a l’avantage de ne rien émettre lors de son utilisation, il faut toutefois prendre en compte les émissions générées lors de la production du véhicule et par le mode de production de l’électricité qui vient nourrir sa batterie. Et c’est justement ce que viennent de montrer des chercheurs de la célèbre université du MIT. Ils ont calculé et comparé les volumes de dioxyde de carbone (CO2) lors de l’ensemble du cycle de vie de différents véhicules disposant d’un motorisation thermique, hybride ou 100% électrique.Des conclusions reprises dans un article du Financial Times publié le 8 novembre dernier et qui titre sur “l’image verte noircie des véhicules électriques”. Rapidement, un argument retient l’attention: tout compris, une Tesla Model S P100D, 100% électrique donc, émet davantage de CO2 (226 g/km) qu’une Mitsubishi Mirage (192 g/km) alors que cette dernière dispose d’un moteur essence.
[…]
Une étude récente publiée par Transport & Environment (l’ONG à l’origine des révélations sur le Dieselgate) va également dans le sens d’un avantage à la voiture électrique en termes d’émission de CO2. Au niveau des polluants, le recours au freinage régénératif (la récupération d’énergie lors d’une décélération) sur les électriques et hybrides limite l’usure des freins et donc les dégagements de particules fines. Sur une Toyota Yaris hybride, les freins s’useraient par exemple quatre fois moins vite que sur son homologue seulement à essence.
Il faut dire que la publicité mensongère de la voiture électrique en France, qui se targuait d’être “écologique” et “propre”, a laissé des traces. En 2014, le jury de déontologie publicitaire avait ainsi épinglé deux acteurs pionniers dans ce domaine: Autolib’/Bluelib’ et Renault avec sa Zoé. Et déjà en 2013, plusieurs autres véhicules électriques ou hybrides comme la Citroën C-Zéro, l’Opel Ampera ou encore la Nissan Leaf.
Les défenseurs de l’environnement se font ainsi rarement les avocats du véhicule électrique. […] Amnesty International vient ainsi de publier un rapport sur les entreprises se fournissant en cobalt et dans lequel Renault apparaît très mal classé. Du cobalt potentiellement extrait par des enfants dans les batteries des sympathiques Zoé… forcément cela peut décourager de passer à l’électrique.
Et si nos dirigeants se sont convertis depuis peu au tout-électrique, il convient de rester méfiant quand on sait comment les Français ont été encouragés pendant des années à acheter du diesel… qui est devenu depuis le mal absolu.
Au salon de Francfort, le patron de PSA Carlos Tavares avait ainsi réaffirmé l’engagement des marques de son groupe (Peugeot, Citroën, DS et Opel) à électrifier leur offre, tout en s’inquiétant des conséquences d’un virage trop précipité dans l’électrique:
“Comment allons-nous produire de l’énergie électrique propre, quelle est l’empreinte carbone de la fabrication des batteries et celle du recyclage […]? En tant que citoyen, il faut s’interroger [pour] éviter […] que dans 20 ou 30 ans, nous nous posions les mêmes questions sur l’électrique que celles que nous nous posons aujourd’hui sur le diesel“, avait-il déclaré.
Reste à savoir s’il ne faudra pas rapidement différencier les véhicules électriques selon leur niveau de consommation et l’origine de l’électricité consommée. Le risque étant d’inciter actuellement les constructeurs à proposer des véhicules avec des batteries de plus en plus imposantes pour gagner en autonomie. Mais le recours à davantage de métaux rares et le fait de transporter une batterie dont le poids n’est pas négligeable peuvent venir nuancer leur bilan environnemental.